Un décret du 9 mars 2017 impose de nouvelles exigences aux propriétaires bailleurs de logements à usage d’habitation.

Ce qu’il faut retenir

Un logement loué à usage d’habitation doit être répondre à la qualification de logement décent.
A défaut, le propriétaire bailleur peut être contraint à réaliser des travaux, à réduire le loyer ou encore à verser des dommages-intérêts au locataire.

Parmi les critères à satisfaire, des exigences de performance énergétique ont été ajoutées :

  • A compter du 1er janvier 2018, le logement devra être protégé contre les infiltrations d’air parasites.
  • A compter du 1er juillet 2018, le logement devra permettre une aération suffisante.

Décret du 9 mars 2017 n°2017-312.

Conséquences pratiques

Selon l’appréciation qui sera faite des nouveaux critères, leur introduction peut contraindre les propriétaires à la réalisation de travaux de mise en conformité. Or, la mise en place du prélèvement à la source va influer sur le traitement fiscal de ces travaux.

En principe, les travaux réalisés en 2017 à l’initiative du propriétaire seront déductibles en totalité des revenus fonciers 2017, ce qui est inutile en présence de revenus courants. Ces dépenses seront néanmoins déductibles des revenus fonciers 2018, à hauteur de 50 % du montant des travaux effectués. Suivant la même règle, les travaux réalisés en 2018 ne seront déductibles qu’à hauteur de 50 % seulement.

En revanche, si les travaux réalisés sont considérés comme des travaux d’urgence, ils seront pleinement déductibles des revenus 2017, ce qui présente peu d’intérêt s’agissant d’une année blanche. S’ils sont réalisés en 2018, ils seront déductibles à 100 % des revenus fonciers dans les conditions de droit commun. Néanmoins, la qualité de travaux d’urgence ne désigne que ceux « rendus nécessaires par l’effet de la force majeure » (Loi de Finances pour 2017, art. 60, II, K-1, 2°).

Pour aller plus loin

Logement décent

Selon la loi du 6 juillet 1989, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent. Les critères de décence ont été définis par le décret du 30 janvier 2002.

D’après les termes de ce décret, le logement décent doit cumulativement :

  • satisfaire aux obligations de sécurité physique et de la santé des locataires,
  • comporter les éléments d’équipement et de confort le rendant conforme à un usage d’habitation,
  • être doté d’une surface habitable minimum.

Loi n°89-462 du 6 juill. 1989, art. 6.
Décret n°2002-120 du 30 janvier 2002.

Cette disposition concerne tous les logements relevant de la législation des baux à usage d’habitation.

Cette disposition a été modifiée par la loi du 17 août 2015, relative à la transition énergétique pour la croissance verte, instaurant la performance énergétique comme un des critères de décence des logements. Un décret était attendu pour définir la performance énergétique minimale à respecter ainsi qu’un calendrier de mise en œuvre échelonnée.

Critères supplémentaires de performance énergétique

Le décret du 9 mars 2017 permet l’application des dispositions de loi du 17 août 2015. Il ajoute des exigences de performances énergétiques aux critères du logement décent. Ces exigences nouvelles se réfèrent à l’étanchéité à l’air et à l’aération correcte du bâtiment.

Protection contre les infiltrations d’air parasites (à compter du 01/01/2018)

« Il est protégé contre les infiltrations d’air parasites. Les portes et fenêtres du logement ainsi que les murs et parois de ce logement donnant sur l’extérieur ou des locaux non chauffés présentent une étanchéité à l’air suffisante. Les ouvertures des pièces donnant sur des locaux annexes non chauffés sont munies de portes ou de fenêtres. Les cheminées doivent être munies de trappes ».

Attention :
Cette disposition ne s’applique pas aux logements situés dans les départements d’outre-mer (DOM).

Aération suffisante (à compter du 01/07/2018)

« Le logement permet une aération suffisante. Les dispositifs d’ouverture et les éventuels dispositifs de ventilation des logements sont en bon état et permettent un renouvellement de l’air et une évacuation de l’humidité adaptés aux besoins d’une occupation normale du logement et au fonctionnement des équipements ».

Remarque :
Les associations de locataires reprochent au décret d’avoir retenu des « critères flous et de fait, inopérants ». Elles regrettent plus particulièrement que la France n’ait pas suivi l’exemple des Britanniques, ayant adoptés une disposition prévoyant l’impossibilité de louer des logements classés F et G qui entrera prochainement en vigueur.
Communiqué de presse du 28 mars 2017.

Sanction

Si tous les critères du logement décent ne sont pas remplis, le propriétaire bailleur ne satisfait pas à son obligation de délivrance, qui lui impose de mettre à disposition du locataire un logement propre à l’habitation.

En effet, l’article 1719, 1° du Code civil dispose que « le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière : de délivrer au preneur la chose louée et, s’il s’agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d’habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l’expulsion de l’occupant ».

Mise en conformité du logement

La loi du 6 juillet 1989 prévoit une procédure particulière (loi de 1989, art. 20-1). Elle permet au locataire de demander la mise en conformité du logement, sans qu’il soit porté atteinte à la validité du contrat en cours.

A défaut d’accord ou à défaut de réponse dans un délai de 2 mois, le locataire peut saisir la commission départementale de conciliation pour avis ou saisir directement le juge.

Si le juge du tribunal d’instance constate que le logement ne satisfait pas aux normes de décence, il peut :

  • contraindre le bailleur à faire les travaux nécessaires,
  • imposer une réduction de loyer ou suspendre son paiement jusqu’à l’exécution de ces travaux,
  • fixer des dommages et intérêts.

Attention :
Le locataire ne doit en aucun cas cesser de payer tout ou partie de son loyer sous prétexte que le propriétaire ne respecte pas ses obligations.
Il peut néanmoins en être dispensé lorsqu’il se trouve dans l’impossibilité totale d’utiliser les lieux loués (voir par exemple, Cass. civ. 3 du 28 avril 2009, n°08-11749).

Départ du locataire

Le locataire peut demander la résiliation du bail en raison du manquement du bailleur à son obligation de délivrance d’un logement propre à l’habitation (C. civ. art. 1217).

S’il ne souhaite pas engager de procédure judiciaire, il arrive que le locataire donne simplement congé au propriétaire afin de quitter le logement. Il doit alors respecter les formes prévues par la loi.

Toutefois, il peut être dispensé de payer les loyers pendant le préavis dès lors que le propriétaire a entrepris des travaux de rénovation (Cass. civ. 3 du 19 mai 2010, n°09-13426).

Plus encore, en cas de manquement grave du bailleur, le locataire qui vit dans un logement indécent peut quitter les lieux sans préavis.

Exemple :
Un locataire privé d’eau pendant plusieurs mois peut être dispensé de préavis. « Mme Y… avait été privée d’eau le 15 avril 2001 et qu’elle l’était toujours le 12 juin, qu’elle avait introduit une action en référé pour obtenir son rétablissement et qu’elle avait quitté les lieux alors que son nouveau logement n’avait pas encore d’électricité, la cour d’appel, qui a pu retenir que cette privation d’eau était à l’origine du départ de Mme Y…, en a exactement déduit que celle-ci n’était pas redevable d’un préavis pour le logement qui n’était pas conforme ».
Cass. civ. 3 du 2 mai 2007, n°06-11172

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