Des travaux d’amélioration perdent-ils leur caractère déductible lorsqu’ils sont importants ?
Ce qu’il faut retenir
Selon la destination de l’immeuble (à usage d’habitation, commercial, loué nu ou meublé, etc.), les dépenses ne sont pas toujours déductibles.
Voir : Déductibilité des travaux selon la nature de l’immeuble et les principales catégories de travaux.
Lorsque l’immeuble est loué nu à usage d’habitation, les dépenses déductibles des revenus fonciers sont prévues par les articles 31 et 13 du CGI.
L’article 31 du CGI énumère les dépenses déductibles des revenus fonciers, notamment dépenses d’entretien, de réparation et dépenses d’amélioration (exclusion faite des travaux de construction, de reconstruction ou d’agrandissement).
La liste établie à l’article 31 du CGI n’est pas limitative et, en application du principe général prévu à l’article 13 du CGI, l’ensemble des dépenses effectuées en vue de l’acquisition ou de la conservation du revenu sont déductibles des revenus fonciers (cela suppose en tout état de cause que l’immeuble soit conservé et loué à l’issue des travaux).
Il n’existe pas de liste ni de seuil permettant de classer les travaux, selon leur nature, en dépenses d’amélioration ou de construction, reconstruction ou agrandissement : une appréciation au cas par cas doit être réalisée.
Ainsi, les travaux ne modifiant par le gros-œuvre et ne créant pas de surface habitable demeurent des travaux de réparation et d’amélioration quand bien même les travaux seraient importants car portant sur un immeuble inoccupé depuis des années et de surcroît en mauvais état.
CAA Bordeaux du 5 avril 2017, n°15BX01508
Conséquences pratiques
La qualification de travaux de reconstruction et d’agrandissement a été exclue sur le seul motif qu’ils ne portent pas sur le gros-œuvre et n’ont pas augmenté la surface habitable. L’importance des travaux en l’espèce ne semble pas fait échec à la qualification de travaux d’amélioration (ou plus précisément la Cour de cassation ne se prononce pas sur la question).
Or, selon leur importance, les travaux d’aménagement interne peuvent constituer des travaux de reconstruction.
Récapitulatif des dépenses déductibles (immeuble loué nu à usage d’habitation imposable en revenus fonciers)
Nature des dépenses | Définition | Remarque | Exemple | |
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Entretien et réparation | Maintien ou remise en bon état de l’immeuble pour permettre un usage normal.
Sans modification de la consistance, de l’agencement ou de l’équipement initial. BOI-RFPI-BASE-20-30-10, § 10 |
Le remplacement d’un élément ou d’un équipement obsolète par un équipement plus moderne ne suffit pas à ôter le caractère de dépense de réparation ou d’entretien.
BOI-RFPI-BASE-20-30-10, § 30 |
Notamment :
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Amélioration | Apport d’un élément nouveau de confort ou mieux adapté aux conditions modernes de vie.
Sans modification de la structure de l’immeuble. BOI-RFPI-BASE-20-30-10, § 70 |
La distinction entre travaux d’amélioration et travaux de construction, reconstruction et agrandissement est une question de fait. |
Notamment :
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Rappel :
L’ensemble des dépenses d’amélioration sont déductibles lorsqu’elles portent sur un immeuble à usage d’habitation. Lorsqu’elles portent sur immeuble à usage professionnel ou commercial, seules les dépenses d’amélioration destinées à faciliter l’accueil des personnes handicapées ou destinées à protéger les locaux de l’amiante sont déductibles. BOI-RFPI-BASE-20-30-20, § 80 et s.
Récapitulatif des dépenses NON déductibles (immeuble loué nu à usage d’habitation imposable en revenus fonciers)
Nature des dépenses | Définition | Remarque | Exemple | |
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Construction, reconstruction, agrandissement | Modification importante au gros-œuvre de locaux existants.
Aménagement interne qui, par son importance, équivaut à une reconstruction. Augmentation du volume ou de la surface habitable de locaux existant. BOI-RFPI-BASE-20-30-10, § 110 |
La distinction entre travaux d’amélioration et travaux de construction, reconstruction et agrandissement est une question de fait. |
Notamment :
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Attention :
Il n’est pas rare qu’une même opération comporte des travaux de natures différentes. Dans ces circonstances, le caractère déductible s’apprécie globalement lorsque les travaux sont indissociables (BOI-RFPI-BASE-20-30-20, § 270) ou individuellement lorsque les dépenses sont dissociables (BOI-RFPI-BASE-20-30-20, § 240). Le caractère dissociable ou non des travaux est une question de fait, appréciée au cas par cas.
Pour aller plus loin
Contexte
Un immeuble vétuste nécessite souvent d’importants travaux pour le rendre habitable et conforme aux normes d’hygiène et de sécurité. Dans une telle circonstance, ces travaux peuvent osciller entre simples travaux de réparation, d’amélioration ou de reconstruction. Les conséquences fiscales qui en découlent ne sont pas neutres.
La Cour administrative d’appel de Bordeaux a eu l’occasion de statuer sur la nature de tels travaux et leur déductibilité en matière de revenus fonciers.
Faits et procédures
Les époux X ont acquis un immeuble au travers d’une SCI.
Divers travaux sont effectués en vue de sa location (travaux d’assainissement et de collecte d’évacuation des eaux de pluie, modification du cloisonnement en vue d’une redistribution des pièces, réfection de la toiture, des sols et plafonds, percement de deux portes dans le mur extérieur, rehaussement de la toiture, création d’une terrasse et d’un cellier) et sont reportés en déduction des revenus fonciers comme étant des travaux de réparation et d’amélioration.
L’administration rejette cette déduction, qualifiant les travaux de dépenses de reconstruction.
Les époux X rétorquent que ces travaux ne peuvent être des travaux de reconstruction car il n’en ait résulté aucune modification du gros-œuvre ni aucune augmentation du volume ou de la surface habitable et avait seulement pour objet d’améliorer les locaux.
L’affaire est portée en justice mais le tribunal administratif rejette leur demande.
Arrêt
La Cour administrative d’appel de Bordeaux fait droit à la demande des époux X, les travaux ne sont pas des travaux de reconstruction ou d’agrandissement car ils n’ont pas touché de façon notable au gros-œuvre et n’ont pas eu pour objet d’augmenter la surface habitable, nonobstant l’importance des travaux réalisés sur l’immeuble inoccupé pendant plusieurs années et en mauvais état.
Analyse
Le BOFiP le rappelle très justement, la qualification des travaux constitue une question de fait tranchée par les juges (BOI-RFPI-BASE-20-30-10 § 120).
En l’espèce, l’immeuble nécessitait des travaux importants car il était inoccupé depuis plusieurs années et en mauvais état.
Divers travaux ont porté sur la réfection de la toiture, des sols et plafonds ainsi sur l’évacuation des eaux de pluies : à n’en pas douter, ils constituent des travaux de réparation et d’amélioration.
Cependant d’autres travaux d’aménagement interne posaient difficulté : modification du cloisonnement en vue d’une redistribution des pièces, percement de deux portes dans le mur extérieur, rehaussement de la toiture, création d’une terrasse et d’un cellier.
Les juges de la Cour administrative d’appel de Bordeaux ont considéré qu’il ne s’agissait ni de travaux de reconstruction (puisqu’ils n’ont pas touché de façon notable au gros-œuvre) ni de travaux d’agrandissement (puisque la surface ou le volume habitable n’ont pas été augmenté).
Or, la Cour administrative d’appel ne se prononce pas expressément sur le troisième critère des travaux de reconstruction et d’agrandissement : travaux d’aménagement interne qui, de par leur importance, peuvent constituer des travaux de reconstruction.
Rappel :
Les travaux d’aménagement interne important tels que les opérations aboutissant à une augmentation du nombre d’unités de logement ou encore la restructuration interne de l’habitation ayant entraîné le remaniement des cloisons internes et le percement d’un certain nombre d’ouvertures extérieures constituent des travaux de reconstruction. BOI-RFPI-BASE-20-30-10 § 110 et 120