Une plus-value sur titres est un revenu qui, par nature, n’est pas susceptible d’être recueilli annuellement.

Ce qu’il faut retenir

La plus-value réalisée à l’occasion d’une réduction de capital constitue, par nature, un revenu exceptionnel qui n’est pas susceptible d’être recueilli annuellement.

CE 19 mars 2018 n°399150

Il est ainsi possible d’appliquer le système du quotient à ce revenu, à la condition qu’il soit aussi exceptionnel par son montant : il doit être supérieur à la moyenne des revenus nets imposables des 3 années précédant sa perception.

Rappel :
La règle du quotient permet d’atténuer les effets de la progressivité de l’impôt. Elle consiste à ajouter le quart du montant net du revenu « exceptionnel » au revenu net imposable « ordinaire », puis à multiplier par quatre le supplément d’impôt ainsi obtenu.

Conséquences pratiques

La qualification de revenu exceptionnel a été retenue, même si 2 ans plus tôt une opération identique avait été réalisée.

On notera cependant que cette première opération n’avait pas généré de plus-value.

Rappel :
Le Conseil d’Etat prend soin dans son arrêt de préciser que le rachat d’action par une société relève du régime des plus-values mobilières (conformément à la décision n° 2014-404 du Conseil constitutionnel). Notez qu’une réduction de capital peut générer une plus-value (rachat par la société de ses propres titres) ou un revenu de capitaux mobiliers (réduction de capital non motivée par des pertes). On comprend que la Cour qualifie le revenu d’exceptionnel parce qu’une cession de titres est réalisée une fois pour toutes (les titres correspondants sont « détruits » ). En conséquence, ces actifs ne pourront plus générer de flux pour l’avenir. Ce ne serait sans doute pas le cas en cas de réduction de capital « ordinaire » par diminution du nominal, par exemple. Reste que cette décision est contraire à la doctrine ancienne de l’administration fiscale qui considère qu’une plus-value ne peut être regardée comme un revenu exceptionnel dès lors que le contribuable a réalisé au cours des années antérieures et postérieures des opérations de même nature. C’était aussi la position du Conseil d’Etat. Ce dernier évolue de fait par rapport à sa doctrine antérieure : la réalisation répétée d’opérations ne semble plus empêcher définitivement l’application du système du quotient.

Pour aller plus loin

Contexte

L’article 163-0 A du CGI prévoit, pour les revenus exceptionnels ou différés, un régime particulier d’imposition dit « système du quotient ». Ce système a pour but d’éviter que la progressivité de l’impôt n’aboutisse à soumettre ces revenus à une imposition excessive. Le quotient bénéficie uniquement aux revenus exceptionnels c’est-à-dire aux revenus qui remplissent les critères cumulatifs suivants :

  • Le revenu doit être exceptionnel par sa nature c’est-à-dire qu’il ne doit pas être susceptible d’être recueilli annuellement.
  • Le revenu doit être exceptionnel par son montant c’est-à-dire qu’il doit dépasser la moyenne des revenus nets d’après lesquels le contribuable a été soumis à l’impôt au titre des trois années précédant celles de la perception dudit revenu.

Faits et procédure

En 2008, une société a racheté ses propres titres à une de ses associées, puis a procédé à une réduction de capital. L’associée a demandé, pour l’imposition de sa plus-value, à bénéficier du système du quotient.

L’administration fiscale a refusé d’appliquer le système du quotient, l’affaire est portée en justice par la contribuable. La Cour administrative d’appel de Marseille a donné gain de cause à l’administration fiscale qui considérait que la plus-value réalisée ne constituait pas un revenu exceptionnel, Madame B. ayant déjà bénéficié d’un rachat de titres par la société 2 ans auparavant.

Arrêt

Le Conseil d’Etat censure l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille.

Il relève que le rachat d’actions par la société est une opération relevant des plus-values mobilières et constituait un revenu qui, par sa nature, n’était pas susceptible d’être recueilli annuellement : le seul fait que la contribuable avait réalisé une opération similaire, 2 ans auparavant et n’ayant pas généré de plus-values, ne pouvait pas faire tomber la qualification de revenu exceptionnel.

Analyse

L’administration fiscale a déjà eu l’occasion d’admettre que lorsque la plus-value procède d’une opération ponctuelle, le système du quotient est susceptible de s’appliquer à la plus-value imposable.

RM Frassa, JO Sénat du 9 juin 2016

RM Frassa, JO Sénat du 7 juillet 2016

(non reprises au BOFIP).

Le Conseil d’Etat avait précédemment décidé qu’une plus-value de cession d’actions n’est pas exceptionnelle lorsque le contribuable a réalisé des opérations similaires les années précédentes et les années suivantes.

CE 15 juin 2005 n°250218

L’arrêt du 19 mars 2018 permet d’affiner cette jurisprudence : si la répétition exclut les plus-values du système du quotient, la réalisation de manière rapprochée de deux opérations identiques, dont l’une n’a généré aucun gain, ne rend pas une opération « non exceptionnelle ».

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